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Accompagnement du propre – présentation

L’accompagnement du chant grégorien est sujet à polémiques : les uns n’en veulent pas pour préserver la pureté du chant, les autres y sont attachés par le seul fait d’une habitude, d’autres encore veulent pratiquer des bourdons vocaux. Que nous dit l’Histoire ? Tout simplement que les usages furent variés. Dans l’Angleterre du Xe s., à Winchester, le poète Wolstan loue l’orgue « agrandi par l’évêque », instrument qui joue « les sept degrés de la gamme auquel se mêle le demi-ton lyrique » : on devine bien un jeu d’orgue modal, sur lequel on ajoute des modulations qui ne peuvent être que vocales car cet orgue n’a pas de clavier.

Plus tard, dans l’Italie du XIIIe s., Dante (probablement à Florence) note qu’à cause de l’orgue et la cithare un coup on entend les paroles, un coup on ne les entends plus. Mais au même moment, saint Thomas d’Aquin témoigne que nul instrument n’accompagne le plain chant. Même si le lieu évoqué par saint Thomas reste à identifier, on peut en tirer une conclusions simple : au XIIIe s. les pratiques étaient variées selon les lieux.

Il n’est donc pas raisonnable d’affirmer de manière péremptoire que le chant grégorien ne s’accompagne pas. Ce qui se comprend bien mieux, c’est qu’il y a des styles d’accompagnements qui ne sont pas admissibles. En effet, l’âge d’or du chant grégorien se situe entre le IXe et le XIIe s. Or, le clavier a été inventé au XIe s. Il n’est donc pas possible qu’à cette époque l’accompagnement ait pu être autre chose que des bourdons, peu mobiles. Dit autrement : cet accompagnement ne pouvait pas être complexe, et recourir par exemple à des accords de type classique. A partir du XIIe s. la décadence du chant grégorien s’est accompagnée, chez les musiciens laïcs, d’une soif de liberté qui a aussi complexifié l’accompagnement instrumental. Seul le milieu monastique s’en sera préservé. Au début du XXe s. un organiste publie un recueil d’accompagnement très « moderne », revendiquant le droit d’user d’accord complexes. Il était effectivement libre de les proposer, mais il n’était pas libre de nier le recours à la modalité. Heureusement, d’autres l’avaient déjà fait avant lui…

L’accompagnement du chant grégorien a donc fait l’objet de nombreuses éditions, plus ou moins réussies. Toutes, à de très rares exceptions, exigent un bon niveau technique, avec une conséquence regrettable : les organistes suffisamment formés étant rares, on est souvent obligé de chanter sans orgue, y compris l’ordinaire de la messe.

Peut-on faire simple ? Oui. Tout simplement en revenant au fondamentaux harmoniques qui se pratiquaient entre le IXe et le XIIe s. Il n’est pas facile de le faire admettre pour l’ordinaire (Kyrie, Gloria, Credo, Sanctus, Agnus) car on est habitués, depuis des siècles, à des accompagnements brillants et sonores pour accompagner le chant du peuple. Pour cela on dispose d’accompagnement qui respectent la modalité, selon la tradition dont Pierre Cochereau fut, à Notre-Dame de Paris, le meilleur interprête. Mais l’organiste doit posséder une bonne technique.

En revanche, pour le chant du propre (entrée, graduel, alleluia, offertoire, communion) l’accompagnement peut revenir à de simples bourdons en quintes et quartes. Cette solution présente de nombreux avantages pour les chanteurs, et c’est si simple que n’importe qui, débutant sur un clavier, peut jouer cet accompagnement.

C’est cette méthode qui est ici proposée ici. Elle a été testée pour la première fois le 17 janvier 2018 à N.D. d’Aubezine à Angoulême pour la fête de la Sainte Famille. Puis de Pâques 2018 à Pâques 2021 le principe a été mis à l’épreuve chaque dimanche et fêtes à l’église St-Bruno de Bordeaux, et a donné entière satisfaction au clergé et aux chantres. L’ensemble des accompagnements annotés, soit plus de 65 messes, est en cours de mise a propre afin d’ être publié ici. A terme, il est prévu de rassembler ces accompagnement par recueils.

Cette publication concerne le propre grégorien seulement dans la forme extraordinaire, pour la seule raison que, pour l’instant, la demande est, malheureusement, trop faible dans la forme ordinaire.

Alain Cassagnau